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Deux-roues motorisés : nouvelles connaissances et besoins de recherche


Messages recommandés

L'Institut national de recherche sur les transports et leur
sécurité (INRETS) réunit pendant deux jours à Marseille chercheurs et
spécialistes pour réfléchir aux aspects scientifiques de la sécurité du
deux-roues motorisé. Un vent frais qui fait du bien !


A l'initiative de l'Institut national de
recherche sur les transports et leur sécurité (INRETS), près de 150
chercheurs, scientifiques et spécialistes de tout poil planchent depuis
ce matin à Marseille sur la sécurité des deux-roues motorisés.
Et
comme le mistral qui souffle sur la Cité phocéenne, ces ateliers
apportent une bouffée d'air frais particulièrement vivifiante sur le
monde du deux-roues motorisé, loin des affrontements stériles entre
politiques sclérosés dans leur approche sécuritaire du risque zéro et
motards souvent enclins à jouer les vierges effarouchées à la moindre
remise en question.
Mise en place grâce à l'implication de
Pierre Van Elslande, directeur du Département Mécanismes d'accidents de
l'INRETS, la conférence devrait permettre d'aboutir à de véritables
propositions pour réduire les risques liés à la pratique de la moto et
du scooter.
La sécurité des
utilisateurs de deux-roues motorisés est en effet au cœur des
préoccupations actuelles, que ce soit en termes politiques
(répression), économiques (coûts sociétaux de l'accidentologie) ou
industriels (progrès des constructeurs en matière de sécurité passive).
Avant même la clôture
officielle demain par la déléguée interministérielle à la sécurité
routière Michèle Merli herself, un premier bilan de cette conférence
tient dans son intitulé même : "Les deux-roues motorisés : nouvelles connaissances et besoins de recherche".




Développer de nouveaux outils


Un
immense besoin de recherche se fait en effet sentir dans le domaine des
deux-roues motorisés : les statistiques basées sur les Bulletins
d'analyse d'accident corporel (BAAC) établis par les forces de l'ordre
sur les lieux de l'accident ont montré leurs limites
, et l'INRETS peine à généraliser ses Etudes détaillées d'accident (EDA) qui les complètent avantageusement. La
plupart des chercheurs continuent par ailleurs à ne distinguer dans
leurs différents travaux que les "cyclos" de moins de 50 cc et les
"motos" de plus de 50 cc, alors qu'il serait infiniment plus pertinent
d'affiner les catégories en différenciant les "moins de 125 cc" des
"grosses cylindrées", sans parler des différents catégories de
scooters, maxi scooters et motos ou de leurs types d'utilisateurs
respectifs...
Ouvrant ce matin la conférence à la bibliothèque de l'Alcazar, le
chercheur norvégien Rune Elvik de l'Institute of Transport Economics
basé à Oslo a tenté de savoir si les risques encourus par les motards
étaient "équitables et justes", selon la terminologie de John
Rawls, par rapport aux autres catégories d'usagers (automobilistes et
utilisateurs des transports en commun, notamment). Il a identifié neuf
facteurs de risques fondamentaux (énergie cinétique, friction,
visibilité, compatibilité, complexité, prévisibilité, rationalité,
vulnérabilité et tolérance de l'environnement), dont cinq sont
particulièrement importants à moto : la visibilité des motards, leur
compatibilité avec l'environnement, leur rationalité (comportement
"raisonnable"), leur vulnérabilité (absence de carrosserie) et la
tolérance de l'environnement (infrastructures qui "pardonnent" plus ou
moins les sorties de route, chutes et autres glissades).




"Les risques encourus par les motards ne sont pas équitables"

Cette
conjonction de facteurs, que l'on peut résumer en un triptyque
"conducteur - véhicule - environnement", sera d'ailleurs reprise par la
plupart des intervenants : chacune des composantes est à prendre en
compte en situation d'accident.


Il apparaît notamment, selon les études menées par M. Elvik en
Norvège, que le taux d'accidentalité des motards n'est pas plus élevé
que celui des automobilistes, mais que seul leur manque de protection
explique la proportion plus importante de victimes : le risque d'être
blessé dans un accident est beaucoup plus élevé en deux-roues qu'en
voiture, mais les risques d'avoir un accident seraient à peu près
identiques en moto et en voiture.
"Il n'y a aucune preuve que les motards se comportent de façon moins responsable que les autres catégories d'usagers", estime M. Elvik : "au
contraire ils portent un casque, des vêtements protecteurs, roulent les
feux allumés, font l'objet de restrictions de puissance, sont de plus
en plus équipés de système d'antiblocage des roues au freinage et
doivent souvent passer par des permis graduels
".
"Dans la plupart des collisions, ce n'est pas le motard qui est responsable mais une autre catégorie d'usagers", remarque encore le chercheur avant de conclure que le risque est donc "inéquitable et injuste dans la mesure où il est lié à la vulnérabilité du motard".


Une Vision Zéro "complètement erronée"

M. Elvik n'a pas hésité à tordre le cou aux idées "totalitaires" du projet Vision Zéro et ,
qui prévoit notamment de limiter à 30 km/h la vitesse dans les zones où
se trouvent des piétons, 50 km/h aux carrefours et 70 km/h sur les
routes où il peut y avoir une collision frontale entre deux véhicules.
"C'est une vision complètement erronée", a-t-il déploré : "on
ne prend en compte que la vitesse et pas la masse du véhicule, qui est
pourtant très favorable en ce qui concerne les motos. On imagine bien
les conséquences d'un choc frontal entre un camion et une moto roulant
à 70 km/h !
"
Enfin, M. Elvik en a profité pour rappeler
qu'il n'avait jamais souhaité interdire les motos, mais que ses propos
avaient été tout simplement déformés par un journal à sensation auquel
il démontrait l'absurdité du projet Vision Zéro qui, s'il voulait aller
jusqu'au bout de sa logique, devrait fixer une vitesse maximale à 15/20
km/h sur tous les types de voies, ou y interdire purement et simplement
les deux-roues... "C'est le rôle des chercheurs de mettre en garde
la société contre les conséquences désastreuses de ce type d'idéologie
totalitaire
", a conclu Rune Elvik avant de laisser la place aux premiers intervenants.
Espérons
que ces travaux - à découvrir prochainement en détails sur Moto-Net.Com
- permettront enfin de faire évoluer les politiques gouvernementales
sur un mode un peu moins binaire que la sempiternelle équation "vitesse
= danger".
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